18 mai 2006

Le sida d'Armenonville

En allant prendre le métro à la station Hôtel de Ville (Paris), j'ai croisé près du pont au Double un homme âgé d'une cinquantaine d'années portant une pancarte autour du cou. Dessus était écrit : "L'euro est mort. Industrialisons l'Europe. Cheminade 2007.". Si je me souviens bien, Cheminade voulait déjà être candidat à l'élection présidentielle en 1995 et 2002. A chaque fois, il a échoué dans sa tentative. Le voici donc de retour sur la scène politique aidé par la force tranquille d'un militant de base. Il doit en falloir du courage et de la conviction pour militer à 8 h 30 du matin dans la rue ! Lorsque le feu rouge stoppait le flot de voitures, l'homme se précipitait pour apporter la bonne parole cheminadiste. Hélas pour lui et son grand homme, les automobilistes avaient d'autres soucis en tête : aucun n'a accepté de baisser la vitre. Décidément, les Français n'ont plus goût au débat !

Aujourd'hui, j'ai participé au Pavillon d'Armenonville, près de Paris, à un colloque sur le VIH organisé par un grand laboratoire. De nombreux médecins ont pris la parole pour parler CD4, charge virale, stratégie ou tactique thérapeutique (ce qui n'est pas la même chose), études, cohortes et autres sujets très importants. Des séropos étaient présents et certains ont pris la parole pour discuter à égalité avec les médecins. Ils ont démontré encore une fois que le sida a été une source essentielle de transformation des relations entre les patients et les médecins. Avant le sida, le monde médical avait tout pouvoir. Avec le sida, les chercheurs, les médecins, les infirmières ont découvert des malades militants qui exigeaient une autre forme de relation notamment au niveau de l'information. Les malades se sont formés et ont appris à décrypter l'inconnu. Cela change tout. Martin Hirsch, directeur d'Emmaüs France, qui intervenait sur le thème "En quoi le sida a-t-il changé la société ?" l'a très bien souligné. "Le sida, a-t-il dit, a donné une place au patient tout à fait différente de ce qu'elle était." Parmi les non médecins qui sont intervenus, je dois aussi évoquer Didier Lestrade. Je sais que le cofondateur d'Act Up-Paris est beaucoup critiqué. Moi, je l'apprécie pour son discours toujours décapant. Cette fois, il a dénoncé le silence du corps médical sur la reprise des contaminations. "Vous n'êtes pas là pour augmenter vos files actives, a-t-il déclaré. Vous devez manifester votre autorité car c'est votre travail, parce que c'est votre éthique." Bien dit, non ?!

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