08 mai 2007

Pédagogie contre injonction

La victoire est nette. Avec 53, 06 % des voix, Nicolas Sarkozy a reçu le soutien de 18 983 408 Français. L'écart avec Ségolène Royal est si important - plus de 2 millions de voix, et le taux de participation si élevé - 83, 97 %, que la décision ne souffre aucune contestation. Nicolas Sarkozy est devenu ce dimanche 6 mai un président à forte légitimité, et un président d'une France largement inféodée aux valeurs qu'il a défendues tout au long de la campagne : ordre, autorité, travail. Ces valeurs ne sont pas détestables en soi. Elles sont mêmes nécessaires dans une République qui se respecte, et qui doit permettre aux uns et aux autres de vivre, travailler et évoluer dans la sérénité. Ségolène Royal elle-même les a appuyées avec une ténacité irréprochable. Cependant, je vois une différence d'approche dans la défense de ces valeurs entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal.
Le premier s'est présenté comme un homme de rupture, seul capable de redonner sa place au travail, à l'ordre et à l'autorité. Afin d'attirer à lui une partie de l'électorat du Front national, il s'est emparé du thème de l'identité nationale et a maintes fois répété qu'il en finirait avec la repentance. Il l'a encore dit dimanche peu après l'annonce de son élection. En fait Nicolas Sarkozy veut s'attaquer à la crise morale que traverserait le pays, et il estime être le plus qualifié pour cette tâche. C'est s'identifier à l'homme providentiel, au chef que la France a connu à de multiples périodes de son histoire, pour le meilleur et pour le pire.
La seconde s'y est pris autrement pour parler du travail et de l'autorité. Les débats participatifs ont été le cadre le plus représentatif de cette démarche. Non seulement les Français les plus modestes ont pu raconter les difficultés de leur vie au cours de ces débats, mais ils ont proposé eux-mêmes des solutions. Solutions discutées, approuvées ou réfutées. Ségolène Royal a préféré la pédagogie à l'injonction. C'est toute la différence avec Nicolas Sarkozy, et quelle différence !
En fin de compte, je suis assez consterné par le fait qu'une majorité de la population estime sa situation si intenable qu'elle se jette dans les bras d'un homme avec autant de frénésie. Je le suis encore plus quand ce groupe enjoint à un homme providentiel de remettre la société sur les rails de la bonne moralité. Lorsque la puissance publique investit la morale à la place des citoyens, des dérives sont toujours à craindre.

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